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Peut-être est-ce la lumière qui tombe soudain en vous

Posté par traverse le 28 octobre 2007

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Peut-être est-ce la lumière qui tombe soudain en vous,  parfois même cela éclaire un  peu ce qui vous tenait agrippé à vous ne savez quoi mais qui glace cette légèreté des arbres dans la nuit, si libres malgré les fers qui les retiennent ici ? Peut-être est-ce un frisson qui vient d’un au-delà de vous, de la terre sur laquelle vous tentez de fonder une tribu de songes, peut-être est-ce un amour qui s’est perdu dans des frimas d’orgueil ? Peut-être. Mais c’est aussi du temps qui s’estompe dans des éclats de voix, des gestes sans entrain et des paroles lentes qui mettent si longtemps parfois à nous désaccorder.  

 

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Le temps vidéo

Posté par traverse le 21 octobre 2007

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    Les accélérés de sa vidéo, voilà ce qu’il lui reste du goût ancien del’aventure. Depuis longtemps déjà, il a renoncé aux accidents du jour. 

         Il distingue le passé du présent à la qualité du « direct » et des retransmissions.     

          Le défilement des images ouvre en lui un passage étroit entre sa vie et le rêve de sa vie qui appartient désormais à l’ordre du montage.           Il reste assis des heures entières, comme un mendiant, au pied de son écran, le bras tendu, la télécommande à
la main.  Que faire de l’autre main ? 

         Par la fenêtre donnant sur les toits, il n’aperçoit déjà plus que la lune légèrement saturée de rose.  La nuit est tombée sans bruit et il a perdu le goût de sa lente progression qui le tenait éveillé, il y a quelques années encore, une éternité aujourd’hui. Il ne se fie plus aux indications de programme du journal, aux horaires, aux cycles annoncés.  Il a oublié depuis longtemps les rigueurs de l’attente et les affres des retards. Il flotte et plonge, de temps à autres, dans le liquide amniotique des images. Il n’appartient plus au monde, il se fond en lui, volubile ou muet.  «Peu importe que je n’attende plus aucune promesse, que j’aie perdu l’habitude des réponses.  Les questions sont les servantes de l’inconfort. »           Et d’une légère pression du pouce sur le velours caoutchouté du zappeur, il passe à une autre émotion, il glisse vers le mirage de nouveaux sentiments. 

         Le lendemain, café recuit, vite avalé, il plonge dans le flou du monde matinal.           C’est la pluie, ou un brouillard persistant, c’est sûr…Ou un vol de cigognes, comme ces crétins de l’Hôtel du Peuple m’ont répondu à Varsovie…Les cigognes…» Mais il oublie de vérifier par la fenêtre donnant sur les toits et règle le téléviseur. 

         La journée traîne d’une inquiétude à l’autre. Un épisode manqué il y a quelques jours lui a fait comprendre soudain les beautés secrètes de la nature africaine.  Il est convaincu que ce trou accidentel de cinquante minutes suffira à le disqualifier dans sa volonté de comprendre le monde. Un épisode manque et le temps est suspendu. Il note mentalement qu’il devra rattraper ce retard. «Ils reprogramment toujours tout » pense-t-il en souriant, et cette idée le rassérène à l’instant. Les émotions sont l’opium de la démocratie, annonce-t-il à qui veut encore l’écouter. Il faut les refroidir, les réfrigérer, les anesthésier en les usant par
la répétition. Et de cela, les programmateurs sont conscients comme de leurs vices les plus secrets : mêler les caprices émotionnels aux questions de survie, voilà une belle façon de lisser le temps, le monde et la souffrance des hommes. 
         Elle téléphone vers 17 heures.  Elle est libre ce soir, revient d’un voyage lointain.  Ca fait si longtemps déjà qu’ils ne se sont pas vus.  Une pensée furtive pour son corps frais. Il cherche un qualificatif mais rien ne vient si ce n’est l’image de
la speakerine.  Il raccroche en s’excusant d’être trop occupé ces jours-ci.  Un voyage à préparer, lui aussi.  Oui, l’Afrique, plus tard certainement, il est désolé. 

         Téléphone encore, c’est une erreur, elle le met de mauvaise humeur. Il se décide à débrancher le combiné. Bien lui en coûte, il a oublié de programmer les enregistrements de
la journée. Il plonge vers l’écran : tout est normal, les images défilent.  L’Afrique encore. Une émission consacrée au génocide des gorilles ou des pygmées, il ne sait plus vraiment, mais c’est l’émotion qui domine…Profonde, ancrée dans sa colère ancienne, une belle émotion, vraiment, il faudra qu’il s’en souvienne… 
         L’Afrique soudain lui donne faim, il hésite, le frigo est loin. Autre chaîne, patins à glace, bon. Les championnats reprennent, mauvais présage. Il connaît la période exacte de toutes les  compétitions, olympiques, tours cyclistes ou matches importants et imagine les millions de regards attentifs tournés vers le petit écran. La connivence de cette foule l’indispose, l’inquiète même. Il préfère la solitude des émissions nocturnes, la valse lente des reprises, les sagas interminables.  Il sait que ces spectacles n’offrent aucune occasion de suspense. La machine tourne pour tourner, spectateurs compris. Les donnes sont claires. C’est encore ce qu’il préfère, cette interminable répétition sans accroc. 

         Il a la conscience nette des ratés du monde. « Il suffirait, murmure-t-il en mâchant son sandwich du soir, qu’ils visionnent tout comme moi.  Les pannes leur apparaîtraient bien plus visibles, évidentes même …Mais ils n’ont pas encore accédé à la clairvoyance qui est le propre des témoins muets »…           Il est aux toilettes, il prend son temps, les informations sont moins passionnantes que les fictions d’hier, et il tire la chasse d’eau en tendant l’oreille vers les commentaires sans invention. Il pense encore : « A quoi sert de filmer de nouvelles catastrophes, à quoi sert le cadrage toujours plus serré du massacre ?  Les images d’hier suffiraient. » Il comprenait l’infini possible du futur en instance de montage. » 

         Il a souvent hésité à leur écrire, aux programmateurs, aux serviteurs de l’infini, à leur expliquer comment alterner les rétrospectives et les histoires les plus plates en glissant ça et là quelques éclats bien cadrés de la putréfaction cathodique.  Mais autant demander à un bègue de se taire !           La nuit se déplie maintenant comme un chat sur le radiateur, sans indication autre que le générique sous-titré du film du ciné-club. Il s’en contente même s’il l’a déjà vu trois fois. Tant que l’image coule, la vie continue. 

         Il s’installe confortablement dans le canapé orthopédique, le programme l’emporte doucement, il est heureux. 

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J’ai reçu des lettres d’amour et de rupture

Posté par traverse le 9 octobre 2007

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J’ai reçu des lettres d’amour et de rupture, de colère et de crainte, de tendresse et d’intérêt, j’ai reçu des lettres qui m’étaient destinées et d’autres, par hasard qui tombaient dans ma boîte, j’ai reçu des lettres que j’ai ouvertes à peine les avais-je découvertes, d’autres que j’ai jetées des années plus tard sans jamais les avoir lues, j’ai reçu des lettres qui étaient des remparts et d’autres des tunnels impitoyablement creusés, des lettres mal écrites et qui changeaient ma vie, d’autres qui semblaient rutilantes et qui portaient la pestilence, des lettres sans ambition et qui me hissaient hors de moi, des lettres présomptueuses dont je me suis torché, du papier parfois mal raturé, de la rame gaspillée, de l’encre conchiée, des dates trafiquées, des signatures mal imitées, des lettres qui n’auraient jamais dû connaître le sacrifice du timbre et de l’enveloppe, des messages qui se posaient comme des missives sans importance, des appels qui répondaient absents, des mises au point qui n’étaient que des mises à plat sans inspiration, des lettres que je garde encore aujourd’hui sur moi car leur justesse et leur beauté m’ont porté, des lettres que j’ai jetées et que je cherche encore, d’autres que je garde et que je regretterai de ne pas avoir brûlées, des lettres sans inspiration et sans commune mesure avec le silence qui les précédait, mais aucune n’est arrivée à me convaincre du silence qui nous entoure. Ce sont des lettres, des objets du passé. Des façons de dire. Des choses qui entrent en nous.

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Ce soir la ville que j’habite

Posté par traverse le 4 octobre 2007

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Ce soir la ville que j’habite me semblait si petite, à la table où je travaille des femmes de tous vents et de tous courants d’air déposaient leur pays, les fleuves, les gares et les maisons qu’elles commençaient à repeindre au fil des phrases et des rires. L’une vient de Chine, l’autre de Hongrie, elles fourbissent des silences comme on signe un pacte, elles font d’un temps un autre et les mêlent en regardant au loin, elles sont belles sans cesse dans cette disparition et je vois leur souci d’encore toujours en rester là. 

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Des vases roses cuisent dans la main d’Istanbul

Posté par traverse le 1 octobre 2007

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Des vases roses cuisent dans la main d’Istanbul et des fiacres basculent dans des effrois de chevaux pendant que les enfants passent leurs doigts dans leurs cheveux rasés. Un peu de notre éternité roule dans les rues de bitume et de sable et la musique pique cette vieille image aux murs blancs des maisons. Un vent frais a pénétré les hommes qui prolongent la pêche en se roulant des pulls sur les épaules. Ils fument, mâchent et crachent en regardant le fil qui les tire vers des lieux qu’ils fréquentent si peu, des chambres toujours froides ou fort mal éclairées qu’ils habitent parfois quand le poisson est lent à mordre. 

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